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Les bibittes à couleur

Note: ce texte a été créé et imaginé à partir de lignes pigées au hasard dans des livres à moi (phrases en gras dans le texte). C'était une activité dans le cadre d'un cours de création littéraire. 
 
 

LES BIBITTES À COULEUR
 
 
Ici, vous êtes en Amitola. Cet espace entre la Terre et les cieux a des crevasses sans fond, sans cesse crées par les amoncellements d’arcs-en-ciel trop fréquents. La raison de tous ces phénomènes multicolores? Trop de pluie, trop de soleil. Ben quoi, on ne sait pas. Et pour les crevasses? Même chose. C’est comme ça : un jour on monte sur un nuage, puis PAF! un arc-en-ciel. Puis on tombe… Pourquoi? À cause des bibittes à couleur. Il y en a des rouges, des oranges, des jaunes, des vertes, des bleues, des violettes, puis ils s’étirent et mangent l’air sur leur passage. On ignore toujours pourquoi, mais n’empêche que ça creuse des crevasses jusqu’à terre. Et donc on tombe. 
 
Le seul qui ne tombe jamais, c’est l’elfe des montagnes. L’elfe des montagnes a élu domicile. sur les plus hauts sommets, ce qui fait qu’il marche sur les nuages, au-dessus même des arcs-en-ciel. Pas bête ça! Par contre, lui, il est invisible, alors de toute façon, s’il tombait, on n’en saurait rien. 
 
Cependant, quand les elfes se matérialisent pour… Mais pour quoi donc? Ils sont bien heureux comme ils sont, après tout. D’ailleurs, jamais personne n’a vu le moindre elfe en Amitola depuis la révolte des arcs-en-ciel. Malgré tout, tous affirment, sans la moindre hésitation, qu’ils existent.  
 
Le ciel avait bien mal à la tête, ces derniers temps. Il ouvrit les yeux en baillant alors que le soleil commençait à se lever en souhaitant le bonjour à tout le monde. Oui, maintenant vous le savez : un ciel, ça parle. Ça grouille de vie, et quand c’est triste, ça pleure, et quand c’est joyeux et que le soleil le fait rire, il ouvre grandes ses paupières. Le soleil, lui, ne parle pas par contre. C’est seulement les étoiles que le ciel recolle ensemble, quand il a trop peur du noir. 
 
Donc, le ciel venait d’ouvrir les yeux, en baillant, car il était bien fatigué de ne pas bien dormir à cause de son vilain mal de tête. Les arcs-en-ciel! Toujours eux! Il n’arrivait pas à résoudre le problème, et cela devenait urgent… Pour remédier à la situation, le ciel avait décidé de pleurer plus souvent, mais c’était sans succès : dans le temps de le dire tout s’en retrouvait inondé! Pour cela, il se décida enfin à parler aux nuages, qui devaient encore dormir tranquillement dans leur enclos. Il y avait à la porte un écriteau indiquant qu’on ne devait pas les déranger, et ce, sous aucun prétexte : mais comme le ciel avait droit sur tout (et il faut le dire, il avait toujours raison aussi), il entrait à sa guise. Ce n’était tout de même pas une simple pancarte qui allait contrarier son chemin! 
 
Voici donc ce que lui dirent les nuages : 
 
«Tu vois, on te l’avait dit que tu nous faisais faire trop d’heures supplémentaires : tu es triste beaucoup trop souvent! On est épuisés! Vois : c’est le Grand Déluge!» 
 
«Oui, mais que faire?» de demander le ciel. 
 
«Tu veux tout à la fois : le soleil, la pluie, et nous autres, nuages! Décides-toi, bon sang!» 
 
Il en conclut qu’il devait donc faire travailler plus souvent le soleil. 
 
Mais les rayons du soleil n’écartèrent pas tous les soucis, et un autre tout aussi grave commençait à s’y laisser bronzer. Non, il n’y avait plus d’arcs-en-ciel, mais il n’y avait plus d’eau non plus. Voilà qui n’était guère mieux… 
 
Pour régler cet autre problème, le ciel descendit vers la terre pour lui demander conseil. Cependant, la terre avait la gorge trop sèche et ne pouvait donc pas répondre : ce fut sa fille Kateya qui, enrubannée dans ses vêtements de soie, prit la parole au nom de sa mère : 
 
«Le désert nous prends nos hommes, dit-elle, et notre eau aussi. Pas que ma mère et moi n’aimons point la compagnie du soleil, mais tout meurt, desséché et assoiffé. Nos hommes ne se nourrissent plus que de récits, les récoltes ayant été noyées dans la pluie des nuages puis celle du soleil… » 
 
Le ciel, intrigué par le mot «récit», demanda à la jeune fille de lui expliquer le tout. 
 
«Je ne puis vous le dire, répondit-elle. Les récits ne s’expliquent pas; ils se racontent.» 
 
Voyant l’intérêt du ciel toujours attentif à ce qu’elle disait, la fille de la terre lui narra le récit du début des temps. 
 
«Au commencement, l’Ëtre Créateur imagina le ciel et la terre. Il décida qu’il serait bon que le ciel pleure pour nourrir la terre, et il nomma cela la pluie. Peu à peu, cette pluie forma des étendues d’eau sur le corps de ma mère, et cela jusqu’à devenir des ruisseaux, des étangs, des lacs, puis, pour finir, des océans. Tout cet univers qu’avait créé l’Ëtre Créateur était alors conçu pour s’auto suffire : il personnifia le ciel, puis la terre, et bientôt tout le corps de ma mère porta des fruits, puis des animaux et des hommes…» 
 
La jeune fille cessa alors son récit, même si le ciel, suppliant, la pria de continuer. 
 
«Hélas, je ne le peux. Ce n’est qu’un récit, après tout, un récit écrit noir sur blanc sur la feuille blanche de la mémoire de nos hommes. Les récits ne mènent à rien, tout comme les arcs-en-ciel. Ce sont des amoncellements de mots qui creusent des passages pour s’infiltrer dans les yeux des hommes, pour qu’ils puissent voir le récit, un peu comme les arcs-en-ciel sont des amoncellements de bibittes à couleur qui creusent des crevasses jusqu’à terre. Reste à savoir ce que les arcs-en-ciel veulent nous faire voir.» 
 
Le ciel quitta donc la terre, pensif. Y avait-il aussi des passages dans les récits? De vrais passages comme ceux que creusent les arcs-en-ciel? N’empêche que, comme la fille de la terre racontait son récit, le ciel avait l’impression de retomber dans la nuit des temps. Oui, c’était décidé : un jour, il allait s’acheter un livre vide pour écrire des récits. 
 
* * * 
 
Chavatangakwunua n’avait rien à dire. Les pages qu’il avait noircies pouvaient très bien le faire à sa place. Mais on avait tout brûlé. Le village en entier n’était plus que débris avec lesquels jonglait le vent sec, et le livre devait bien en faire partie, lui aussi. Le feu avait tout confisqué. 
 
Les soldats capturés furent dépourvus de leurs armes, même s’il ne s’agissait que d’un crayon. Les écrivains, les peintres, tous ces Ëtres Créateurs d’images et de mots, tous ces artistes avaient été arrêtés pour avoir comploté de créer des univers qui n’existent pas, d’inventer des choses impossibles et impensables. Ils étaient tous coupables de haute trahison envers la Vérité Unique que prônaient les aveugles égocentriques de la police militaire scientifique. 
 
C’était la police militaire scientifique qui les emprisonnait à cette heure dans leur monde décoloré. La grande salle d’interrogation était grise, comme la majeure partie du bâtiment carcéral, d’ailleurs. 
 
«Chavatangakwunua Ohando, donnez-vous raison aux accusations qui pèsent présentement contre vous, soit accusation de complot envers l’État de Suprême Vérité, et donc, par ce fait même, de haute trahison envers ce dernier ?» 
 
«Je n’ai rien fait de tel. Je ne fais qu’écrire.» 
 
«Non, c’est faux : vous inventez des univers avec vos mots. Des univers, qui, par conséquent, n’existent en aucun cas et dont l’État de Suprême Vérité n’oserait jamais admettre l’existence. Vous et vos semblables n’êtes que des charlatans! Vous donner de faux espoirs et de faux rêves à une génération toute nouvelle et porteuse d’une merveilleuse promesse de progrès ! Lisez un peu ceci : «Du pommeau de son arme, il tapa sur le cristal du ruisseau de ses larmes…». Dîtes-moi, Chavatangakwunua Ohando ; pouvez-vous affirmer qu’un tel ruisseau de larme existe ? Et si oui, cas échéant, pouvez-vous seulement le prouver ?» 
 
Chavatangakwunua savait bien que la police militaire scientifique ne comprendrait rien. D’ailleurs, il n’y avait pas vraiment grand-chose à comprendre. Quand on s’obstine à ne voir que ce qui est vrai à l’œil nu ou qui peut bel et bien exister dans l’univers concret et physique de la logique, on perds de vue tout l’essentiel. Chavatangakwunua, lui, voyait au-delà des choses.  
 
Mais ces choses-là, on ne peut prouver qu’elles existent. 
 
Ainsi, comme tous les autres, Chavatangakwunua fut enfermé dans une froide cellule de pierre. Nu comme un vers et n’ayant rien pour écrire… Écrire ! À cet instant il avait tant envie d’écrire ! C’était comme une rage, un amoncellement de bibittes noires qui lui rongeaient le sang, du cœur jusqu’au bout des doigts désarmés. Il aurait eu envie d’une feuille, une seule, rien que pour écrire ceci : «Et les Porcs, Serpents, et Objets de foncer sur eux… » 
 
«…Et de les détruire.» 
 
 
FIN
 
 
 
Amitola : arc en ciel 
Kateya : trace de pas dans le sable 
chavatangakwunua : petit arc en ciel 
Ohando : en colère 
 
 
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Modifié en dernier lieu le 23.12.2007